Un biomarqueur IRM d'intelligence artificielle du trouble du comportement en sommeil paradoxal isolé et de la maladie de Parkinson

Recherche Mis en ligne le 18 février 2022

Images sensibles à la neuromélanine des régions d'intérêt de la substantia nigra pars compacta (SN) d'un volontaire sain dans la première colonne, d'un patient atteint d’un trouble isolé du comportement en sommeil paradoxal (iRBD) au milieu et d'un patient atteint de la maladie de Parkinson (PD) à droite.
La première rangée montre les images sans les régions d'intérêt, la deuxième rangée montre les régions d'intérêt des mêmes sujets en utilisant la segmentation automatique et la dernière rangée montre les mêmes sujets en utilisant la segmentation manuelle.

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Rahul Gaurav, ingénieur de recherche dans l’équipe MOV’IT dirigée par le Pr. Stéphane Lehéricy et le Pr. Marie Vidailhet, à l’Institut du Cerveau, a développé un algorithme d’intelligence artificielle pour étudier de manière entièrement automatique la neurodégénérescence dans la substance noire (SN) à l’aide de l’imagerie par résonance magnétique (IRM) sensible à la neuromélanine, dans le trouble du comportement en sommeil paradoxal isolé (TCSPi), une forme prodromique du parkinsonisme. Les résultats, publiés dans Movement Disorders, ont indiqué que ce modèle est rapide, objective et présente des performances comparables à celles observées avec la méthode manuelle pour détecter les changements de volume et de signal de la SN basés sur la neuromélanine chez les patients atteints de TCSPi et de la maladie de Parkinson. Compte tenu de la précision et de la rapidité de cette approche, puisqu’il ne faut qu’une fraction de seconde pour analyser un seul sujet, cette étude pourrait constituer une étape importante vers la mise en œuvre d’une méthode entièrement automatique et objective d’analyse des modifications de la neuromélanine dans des contextes cliniques et les études de neuroimagerie à grande échelle en éliminant autant que possible le facteur humain.

Le TCSPi se caractérise par des comportements anormaux et la perte de l’atonie musculaire normale pendant le sommeil paradoxal. Ce trouble est un signe avant-coureur fréquent d’une maladie de Parkinson (MP) ou une démence à corps de Lewy, maladies dans lesquelles il existe une perte des neurones dopaminergiques de la SN. Lorsque les premiers symptômes de la MP apparaissent, 30 à 60 % des neurones dopaminergiques de la SN sont déjà perdus. Comme les personnes atteintes de TCSPi sont à un stade prodromique de la MP, la plupart d’entre eux présentent déjà une légère déficience de la SN. Les changements neurodégénératifs de la SN peuvent être détectés grâce au suivi de la neuromélanine par IRM. La neuromélanine est un pigment contenu dans les neurones dopaminergiques. Cependant, leur caractérisation à l’aide d’une segmentation manuelle est une tâche chronophage et qui entraîne une variabilité interindividuelle importante entre les évaluateurs. Il y a donc un besoin crucial d’un cadre automatique robuste pour faciliter la quantification des changements de la neuromélanine dans la SN.

Pour répondre à cette question, le Dr Gaurav a développé un algorithme d’intelligence artificielle étudiant de manière entièrement automatique les changements de la neuromélanine dans la SN chez les patients atteints d’TCSPi et de la MP par rapport aux témoins. Les sujets ont été recrutés dans le cadre de l’étude ICEBERG à l’Institut du Cerveau. Le trouble du comportement en sommeil paradoxal a été confirmé par polysomnographie vidéo au sein du service des pathologies du sommeil de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière dirigé par le Pr. Isabelle Arnulf. Les données d’IRM ont quant à elle été acquises au sein du CENIR à l’Institut du Cerveau.

Il a été constaté que les mesures de la SN différaient significativement entre les groupes de patients avec TCSPi et MP et les sujets témoins. Les patients atteints de TCSPi présentaient des modifications du signal neuromélanine de la SN à un niveau inférieur à celui des patients atteints de MP. Cet algorithme automatique, rapide et indépendant de l’évaluateur constitue donc un outil précieux pour étudier les modifications de la neuromélanine de la SN, ce qui permet une évaluation directe et non invasive des modifications neurodégénératives de cette structure. En outre, ces mesures pourraient fournir des biomarqueurs pour évaluer des traitements modifiant l’évolution de la MP.

L’équipe du Pr. Lehéricy cherche à présent à savoir si l’imagerie de la neuromélanine peut servir de prédicteur de conversion chez ces patients – c’est-à-dire du moment de l’apparition des symptômes cliniques – ou pour estimer le temps avant l’apparition des signes moteurs et l’évolution des changements de la neuromélanine en relation avec la fonction dopaminergique du striatum.

 

Source

Gaurav, R., Pyatigorskaya N., Biondetti, E., Valabrègue, R., Yahia-Cherif, L., Mangone G., Leu-Semenescu S., Corvol J.C., Vidailhet, M., Arnulf I., and Lehéricy, S., 2022. Deep Learning-Based Neuromelanin MRI changes of Isolated REM Sleep Behavior Disorder. Movement Disorders. Mar 10. doi: 10.1002/mds.28933.

https://movementdisorders.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/mds.28933

 

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